2024 en 10 objets

IAN BUSSIÈRES
ibussieres@lesoleil.com

Comme le veut la tradition, Le Soleil fait un retour sur l’année 2024 en 10 objets. Cette fois, rien sur le tramway de Québec ni sur le troisième lien, deux projets «qu’on va crère quand on va les wère». Par contre, l’un des objets en question rappelle un peu la pandémie maudite après 2023, où j’avais (enfin) réussi à présenter 10 objets sans aucun lien avec la COVID. Je vous demande pardon d’avance!

DES LUNETTES POUR L'ÉCLIPSE

Vous vous souvenez du 8 avril? La folie furieuse! Si vous n’aviez pas vos lunettes pour observer l’éclipse totale du soleil visible au Québec, impossible d’en trouver, tout était écoulé partout! Il fallait s’y prendre plus tôt. Pour couronner le tout, les astronomes amateurs ont eu droit à du beau temps pour savourer pleinement l’éclipse. Ceux qui l’ont regardée s’en souviendront toute leur vie. Mais il y a tout de même des bozos, dans certaines écoles, qui ont estimé que c’était une bonne idée de garder les enfants enfermés dans un gymnase durant cet événement qui n’avait pas été visible du Québec depuis 1972 et qu’on ne reverra pas chez nous avant 2106. Peut-être pas un cas pour un recours collectif, mais pas loin!

UNE FRONDE

La madame de Gatineau qui avait vu une dinde sauvage faire irruption dans son salon en 2016 vous l’avait dit: «À va r’venir, la dinde noire!». Et elle est revenue cette année. À Louiseville, en Mauricie, plus précisément. Un dindon sauvage y a «semé la terreur» en début d’année, poursuivant des citoyens. Tellement que le maire de la place, Yvon Deshaies, est allé jusqu’à mettre la tête de l’oiseau à prix. Comme au Far West! Et comme Elliot Belt dans les albums de Lucky Luke, un citoyen l’a pris au mot et a abattu l’oiseau maudit avec une fronde «et deux billes». Cet épisode un peu débile a eu à tout le moins le mérite de nous faire connaître le maire Deshaies, toujours coloré non seulement avec ses déclarations, mais aussi ses chapeaux, sa moustache et ses nœuds papillon. Du bonbon pour Infoman!

UNE BATTERIE D'AUTO ÉLECTRIQUE

Le gouvernement Legault misait beaucoup sur la «filière batterie» dans le contexte de l’électrification des transports. Au point d’investir 510 millions $ de fonds publics, sans compter les 200 millions $ de la Caisse de dépôt et placement, et de promettre 1,37 milliard $ à la société suédoise Northvolt pour construire une usine et des subventions de 1,5 milliard $ pour la production de batteries en Montérégie. Tout ça à un moment où on parlait davantage de pénurie de travailleurs que de chômage. Cette année, les catastrophes se sont accumulées dans le dossier Northvolt: manque de liquidités, annulation d’un projet d’usine en Suède, rationalisation des opérations en Californie et en Europe, 1600 mises à pied en Suède puis, finalement, la compagnie se met à l’abri de ses créanciers en invoquant le chapitre 11 de la Loi sur les faillites aux États-Unis. On nous dit toujours que tout ça n’affectera pas les projets de la compagnie au Québec, mais avouez que c’est de plus en plus dur à croire...

UN PUBLISAC

Un peu avant le printemps, un objet que tout le monde était habitué à voir chaque semaine dans sa boîte aux lettres est disparu: le fameux Publisac de Transcontinental qui contenait circulaires et journal hebdomadaire. Tout ça parce que la Ville de Montréal a pris la décision, plus ou moins bien réfléchie, de les interdire. L’impact a été énorme pour les hebdos, qui perdaient leur véhicule de distribution. Pas évident pour une industrie qui en arrache. Pourtant, les circulaires sont encore là, distribuées sous une nouvelle forme appelée Radar par Postes Canada, qui a aussi repris la distribution de porte en porte de certains hebdos (pour le triple du prix). Et avec la grève des postes, on voit des hebdos tenter de rebâtir leur propre réseau de distribution comme dans le bon vieux temps. Mais sans le p’tit maudit sac…

UN MARTEAU

Dites, vous vous intéressiez au lancer du marteau avant cet été? Soyez honnêtes… Non, n’est-ce pas? Pas surprenant, car, avant les derniers Jeux de Paris, il fallait remonter à Duncan Gillis aux Jeux de Stockholm de 1912 pour voir un Canadien monter sur le podium avec l’argent au lancer du marteau. Con Walsh avait aussi gagné le bronze à Londres en 1908, mais, cette année, c’était spécial. Ethan Katzberg, le sosie de Burton Cummings des Guess Who (c’est pas moi qui le dis, c’est l’ex-Groovy Aardvark Stéphane Vigeant!) a remporté l’or pour la première fois avec un lancer de 84,12 mètres. Mieux encore, Camryn Rogers remportait l’or chez les femmes deux jours plus tard avec 76,97 mètres. Ce qu’ils ont en commun? Ils viennent tous les deux de Colombie-Britannique, nouveau berceau des sports de lancer au Canada.

UN BANDAGE

Que vous le vouliez ou non, le Grand Orange est de retour, et je ne parle pas de Rusty Staub! Et le bandage que Donald Trump portait à l’oreille après la tentative d’assassinat à laquelle il a miraculeusement échappé le 13 juillet à Butler, en Pennsylvanie, est vite devenu un symbole pour ses partisans, comme la photo iconique de Trump, le poing en l’air, après que la balle d’un tireur armé d’une carabine d’assaut AR-15 lui ait effleuré l’oreille droite. Des membres du parti républicain se sont d’ailleurs affichés avec un bandage similaire en guise d’appui jusqu’à la fin de la campagne électorale dont vous connaissez bien le résultat. Après avoir goûté à la médecine d’un tireur fou, vous pensiez que M. Trump allait réaliser qu’un contrôle plus serré des armes à feu aux États-Unis s’imposait? Oubliez ça, quand il est question de fusillades, le président élu parle toujours de «tourner la page» et «d’aller de l’avant».

LA TOUR EIFFEL

Non seulement le monument parisien légendaire a été utilisé lors des superbes cérémonies d’ouverture des Jeux olympiques de Paris, mais la chanteuse Céline Dion s’y trouvait à cette occasion pour sa première performance vocale publique depuis le fameux documentaire qui traitait de son combat contre la maladie de la personne raide. Elle a interprété l’Hymne à l’amour d’Édith Piaf, une performance qui a agréablement surpris tous ceux qui avaient été catastrophés en voyant son état de santé dans le documentaire Je suis: Céline Dion. Malheureusement, la diva n’a pas terminé l’année sur la meilleure note avec une apparition critiquée à un défilé de mode du couturier libanais Elie Saab à Riyad, en Arabie Saoudite. Non seulement certains l’ont accusée d’avoir fait du lip-sync pour interpréter The Power of Love et I’m Alive, mais on a aussi blâmé le fait qu’elle se produise dans un pays pas vraiment reconnu pour respecter les droits de la personne...

UN CHÈQUE

Vous vous souvenez quand le gouvernement de François Legault a distribué, deux fois plutôt qu’une, des chèques de 400$ à 600$ aux Québécois gagnant moins de 100 000$ par an? Plusieurs citoyens dans la section supérieure de cette fourchette salariale ont fait remarquer que ça n’allait pas changer leur vie et qu’ils n’en avaient pas vraiment besoin. En difficulté dans les sondages, le gouvernement canadien de Justin Trudeau a-t-il remarqué que M. Legault avait été réélu en 2022 après cette générosité mal placée? Peut-être, car il a proposé de verser 250$ à tous les travailleurs canadiens gagnant moins de… 150 000$. L’équivalent de donner cinq «piasses» par semaine pendant un an à des gens dont le salaire hebdomadaire est de plus de 2500$… Finalement, le gouvernement Trudeau a accepté de «reporter le débat» sur cette mesure. On verra, mais je parierais qu’on laissera finalement tomber les chèques ou qu’on utilisera plutôt le fric pour une mesure ciblant vraiment les plus démunis. Espérons-le, du moins!

LE PAPILLON BLUESKY

Une nouvelle vague de départs frappe le site de microblogage X (que plusieurs, dont l’auteur de ces lignes, sont incapables d’appeler par un autre nom que Twitter) depuis la nomination de son propriétaire Elon Musk comme responsable de «l’efficacité gouvernementale» dans le cabinet de Donald Trump. La plupart des internautes en colère migrent vers le site BlueSky, dont le logo est un papillon bleu et où on raconte que les échanges seraient moins acerbes que sur X. Impression de déjà vu ici puisqu’en avril 2022, il y avait eu une première vague de migration quand Musk avait acheté le site et changé son nom. À l’époque, les usagers de Twitter mécontents quittaient pour Mastodon, un site semblable dont le logo est un éléphant et où l’on «toote» plutôt que de «twitter». Vous en connaissez beaucoup qui «tootent» encore sur Mastodon? Non? Il y a une raison. Le nombre d’utilisateurs actifs de la plateforme éléphantesque est maintenant sous la barre du million après avoir grimpé de 500 000 à 2,5 millions en décembre 2022. Le nombre d’usagers du papillon a bien sûr monté en flèche ces derniers mois, mais restera à voir si la tendance se maintiendra ou si le lépidoptère connaîtra le même sort que le pachyderme...

UN BRACELET D'AMITIÉ

Si vous vous demandez ce qu’est un bracelet d’amitié, c’est que vous n’êtes clairement pas un ou une Swiftie. Les fans de la chanteuse Taylor Swift ont en effet pris l’habitude de fabriquer eux-mêmes des bracelets semblables à ceux que vous fabriquiez à l’école primaire avec des lettres formant les paroles ou les titres de chansons de Taylor Swift. Si vous vous demandez d’où vient la tendance, ce sont les paroles de la pièce You’re on Your Own, Kid de l’album Midnight qui ont inspiré tout ça. L’interprète aux longues jambes y chante «Parce que des pages ont été tournées, des ponts brûlés. Tout ce que vous perdez est un pas que vous faites, alors fabriquez des bracelets d’amitié, savourez le moment, vous n’avez aucune raison d’avoir peur»… Voilà, le mystère est résolu. Reste à vous en fabriquer un vous-mêmes (où à l’acheter sur Etsy. Je promets de n’en dire rien à personne) pour être dans le vent. Pour ce qui est de voir Taylor en spectacle sur un écran géant du fin fond d’un stade de football ou de baseball, il est un peu tard cependant: sa tournée Eras vient de prendre fin le 8 décembre à Vancouver.