LE

R&B

FRANCOPHONE
PREND SON ENVOL À L'ADISQ!

VALÉRIE MARCOUX
vmarcoux@lesoleil.com

Ce n’est pas tous les jours qu’une nouvelle catégorie fait son apparition à l’ADISQ! La création du Félix pour l’Album de l’année - R&B/Soul est le fruit du travail du regroupement Advance, chapeauté par Widney Bonfils et Corneille, qui a prouvé la pertinence de faire une place à ce genre. «Leur volonté était vraiment de faire la promotion du R&B en français», précise la directrice des galas de l’ADISQ Julie Gariépy.

Hormis dans les catégories spécifiquement créées pour accueillir d’autres langues, au moins 70% des paroles d’un album doivent être en français pour entrer en compétition dans les catégories Album de l’année.

«On a la catégorie Album de l’année – anglophone. Donc, les artistes R&B qui se produisent en anglais ont depuis toujours accès au recensement du gala de l’ADISQ. La nouveauté, c’est la volonté de ce regroupement, autant que de l’ADISQ, d’ouvrir cette catégorie en français», fait valoir Julie Gariépy.

Quand le regroupement Advance a approché l’ADISQ, il a présenté une liste d’artistes et de maisons de disque portant des projets de R&B, de soul et de gospel en français laissant croire qu’il serait possible de recenser assez d’albums chaque année pour présenter cette nouvelle catégorie.

Et même s’il devait sauter une année, ce ne serait pas la fin du monde.

L’an dernier, l’ADISQ n’avait pas recensé assez d’albums de musique électronique francophones pour présenter cette catégorie. Les albums de l’an dernier se retrouvent donc en compétition aux côtés de ceux recensés cette année.

«On a vraiment regardé ça dans un souci de développement», déclare la directrice des galas de l’ADISQ au sujet de la catégorie Album de l’année – R&B/Soul.

C’est un peu dans le même état d’esprit qu’avait été introduit le Félix de l’Artiste autochtone de l’année en 2019.

«Nous [voulions] aider les artistes autochtones à se projeter, à se faire connaître, les inviter à s’inscrire et ça a effectivement fait boule de neige. Il y a une évolution et un développement. Pas qu’il n’y avait pas de musique d’artistes autochtones avant, mais ils n’avaient pas accès à l’ADISQ comme aujourd’hui», soutient Mme Gariépy.

D’ailleurs, la catégorie Artiste autochtone – comme celle de Révélation – franchit une nouvelle étape cette année: elles seront soumises aux votes du public!

Ce changement a pour but d’assurer un rayonnement encore plus grand pour les artistes autochtones et de la relève, car les catégories mises aux votes font l’objet de plus de promotion afin d’encourager la participation du public.

«Au sortir de la pandémie, on savait combien les artistes émergents avaient de la difficulté à se tailler une place: aucune salle de spectacle n’était disponible [et il y avait] très peu de passages radio et télé, parce que tous les artistes ressortaient en même temps. Il y avait vraiment un contingent d’artistes impressionnant! Alors on s’est demandé comment on peut en faire plus pour les artistes de la relève et on était aussi rendu à se poser cette même question quatre ans après la création du Félix Artiste autochtone», explique Julie Gariépy.

En vue de sa 46e édition, l’ADISQ a également décidé d’uniformiser sa méthode pour élire ses Albums de l’année. Avant, certains Félix étaient décernés par l’Académie de l’ADISQ. Maintenant, les gagnants seront tous élus en tenant compte des ventes d’albums et du nombre d’écoutes sur les plateformes en ligne ainsi que du vote d’un jury.

De plus, le poids du nombre de ventes et d’écoute en ligne diminue, passant de 40% à 25%, au profit du vote du jury qui compte maintenant pour 75% de la décision.

«Avoir des jurys qui se prêtent au jeu d’écouter les albums et de voter, ça enrichit le vote. C’est certain qu’on y retrouve une plus grande attention, mais ça va toujours être important pour l’ADISQ de tenir compte de cette valeur mathématique [des ventes et des écoutes] dans le concours», précise la directrice des galas de l’ADISQ.

CINQ NOMMÉS, CINQ PREMIÈRES NOMINATIONS

L’effet de la création de la catégorie Album de l’année – R&B/Soul se fait déjà sentir. Grâce à celle-ci, David Campana, Dee Joyce, Jules, Rau_Ze et Barnev reçoivent leur première nomination à l’ADISQ.

De gauche à droite: Barnev, Jules, David Campana, Rau_Ze et Dee Joyce

Barnev

Jules

David Campana

Rau_Ze

Dee Joyce

L’effet de la création de la catégorie Album de l’année – R&B/Soul se fait déjà sentir. Grâce à celle-ci, David Campana, Dee Joyce, Jules, Rau_Ze et Barnev reçoivent leur première nomination à l’ADISQ. Et certains, trois fois plutôt qu’une!

Rau_Ze et Barnev, qui ont offert leur premier album en 2024, se retrouvent aussi en compétition pour le Félix de Révélation de l’année et le Prix collégial de la chanson.

Mais si la catégorie Album de l’année – R&B/Soul n’existait pas, où aurait atterri leur album?

«Il y a musique du monde [rire], il y a pop… Je pense que c’est les deux catégories dont j’aurais pu faire partie, mais ça n’aurait pas eu le même effet», avance Barnev.

Notamment connu comme choriste de Céline Dion, l’artiste montréalais a profité de la pandémie pour travailler sur sa carrière solo et, en mars dernier, il a lancé l’album Qui je suis, dont l’extrait Le lendemain – une invitation à prendre une pause pour faire des choses qui nous font plaisir – est en lice pour le Prix collégial de la chanson.

Par le passé, Barnev s’est également démarqué dans le groupe NoDéjà ainsi qu’avec sa collaboration à la chanson Soul Pleureur de Dubmatique. Comme les artistes R&B avant cette année, ce duo hip-hop a connu l’époque où il n’existait pas de catégorie spécialement pour eux.

«Dans le temps, ils étaient nommés dans la catégorie rock alternatif, parce qu’il n’y avait pas de hip-hop. Et tu vois comment le hip-hop s’est développé depuis! Ce n’est pas juste parce qu’il y a eu une catégorie, mais ça ouvre des portes».
— Barnev

Bien qu’on l’entende chanter en anglais avec Dubmatique, Barnev a tôt fait d’adopter le français dès ses débuts avec NoDéjà. Même s’il considère écrire et chanter en français comme un défi, le jeu en vaut la chandelle pour l’artiste qui voit le R&B francophone comme un monde de possibilités.

Et il n’est pas le seul.

«J’aime ça écrire en français et me casser un peu la tête», affirme Félix Paul qui, avec Rose Perron, forme le duo Rau_Ze.

Les deux artistes nés sur la rive sud de Montréal se sont rencontrés pendant leurs études en jazz au Cégep Saint-Laurent. Ils ont commencé par écrire quelques chansons en anglais, mais ils ont rapidement changé leur fusil d’épaule afin de participer aux Fancouvertes, entre autres.

«Presque toutes nos influences étaient anglophones, mais, au même moment qu’on commençait […], il y a des projets comme celui de Les Louanges qui m’a donné envie d’écrire en français, ou plutôt en québécois. Il a réussi à prouver que ça se faisait du R&B québ», précise Félix Paul.

«Je pense qu’on a réussi à aller chercher plus de profondeur et de poésie en utilisant notre langue maternelle et notre parlé quotidien».
— Félix Paul

Ce virage francophone a rapidement porté fruit puisque Rau_Ze est sorti vainqueur des Francouvertes en 2022 et peut aujourd’hui s’inscrire dans la toute nouvelle catégorie R&B/Soul.

En l’absence de cette catégorie, Rose Perron aurait bien vu Virer nos vies dans la catégorie Adulte contemporain ou Pop.

«Notre identité traverse chaque chanson, mais, stylistiquement, ça change quand même. Sur l’album, on a des chansons qui sont un petit peu plus gospel, plus pop, plus néo-soul, plus funk… On a même une chanson dubstep», fait valoir Félix Paul.

Perfectionniste, le duo confie avoir fait plus de 900 captations de la voix de Rose Perron pour la chanson L’habitude qui est en lice pour le Prix collégial de la chanson en plus du Félix de la chanson de l’année.

«On voulait la perfection», tranche la chanteuse au sujet de ce morceau qui évoque «la complexité des relations modernes et le sentiment de vulnérabilité que tu peux avoir avec quelqu’un».

La majorité des Félix pour les catégories Albums de l’année, dont R&B/Soul, seront remis lors du Premier Gala de l’ADISQ animé par Sarahmée le 30 octobre prochain à Télé-Québec.

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