LE CLUB DE CURLING SHERBROOKE, JEUNE DE 144 ANS

Bonjour,
D'abord merci pour tout cet éclairage sur l'histoire de ma ville. C'est un rendez-vous hebdomadaire que j'apprécie beaucoup.
Les joueurs des autres régions sont surpris d'apprendre que le Club de Curling Sherbrooke existe depuis 1880, ce qui en fait le 2e ou 3e plus vieux club du Québec.
Je sais aussi que le Club de Sherbrooke s'est relocalisé quelques fois sans toutefois savoir où. Je suis convaincu qu'une telle histoire intéresserait beaucoup de lecteurs.
Gilles B.
Cher Gilles,
Comme vous le mentionnez, le Club de Curling Sherbrooke est l’un des plus anciens regroupements locaux qui soit encore en activité.
Le curling, ce sport importé au Canada par les immigrants d’origine écossaise, est pratiqué dans les Cantons-de-l’Est depuis le 19e siècle. On y joue à Lennoxville, à North Hatley, à Windsor, à Asbestos, à Victoriaville et à Drummondville… Et j’en oublie.
Le Club de Curling Sherbrooke est fondé le 6 novembre 1880. Il porte alors le nom de Sherbrooke Curling and Skating Club et est fréquenté par plusieurs notables et grandes figures de la vie économique et politique locale, surtout anglophone et d’origine écossaise.
Dans un premier temps, il s’installe dans les anciens locaux de la milice de Sherbrooke, sur la rue de Montréal.

Victime de son succès rapide, il doit déménager. C’est donc en 1891 qu’il s’installe sur la rue Water (actuelle rue des Abénaquis), dans un bâtiment nouvellement construit dont on dira qu’il possède l’une des meilleures glaces du Dominion. Un second rink est inauguré en 1909, dans un nouvel édifice bâti juste à côté du précédent. Je ne sais lequel des bâtiments vous avez vu, mais le Club s’y trouve depuis plus d’un siècle, assurément!
Le curling n’est pas qu’une activité sportive dans laquelle, armé d’un balai, on propulse sur la glace les fameux poids qui peuvent peser jusqu’à 60 livres. C’est aussi une activité sociale qui réunit longtemps les notables de la région, parmi lesquels le marchand et philanthrope James S. Mitchell, l’imprimeur James Riddle Sangster ou encore l’homme d’affaires Andrew Paton, qui fait d’ailleurs partie des fondateurs du Club.
Si, au cours des premières décennies, le curling est l’affaire des hommes, les années 1920 (ne sont-elles pas folles, après tout!) fissurent ce clivage. En effet, on ne saurait oublier le Ladies Sherbrooke Curling Club, qui voit le jour en janvier 1922, et réunit dans le même bâtiment les dames de Sherbrooke autour du jeu, plusieurs après-midis par semaine.
Les gagnantes du trophée Fairbanks, remporté par le Ladies Sherbrooke Curling Club (vers 1953). (Photo Fonds Famille Sylvestre, Mhist)
Les gagnantes du trophée Fairbanks, remporté par le Ladies Sherbrooke Curling Club (vers 1953). (Photo Fonds Famille Sylvestre, Mhist)
«C’est ainsi», se souvient Miss B. G. Haight, présidente honoraire du Club, que les femmes «firent du samedi soir, qui était jadis aussi mort qu’un dodo, la soirée la plus joyeuse et vivante de la semaine»! Le Club organise une rencontre annuelle (un bonspiel) depuis 1946 et remporte par la suite plusieurs honneurs, dont le trophée Fairbanks et le trophée Oneida.

Gage de l’importance que prend Sherbrooke dans le monde du curling, le club féminin remporte en 1941 l’un des plus grands honneurs de ce sport en se voyant remettre le Royal Victoria Jubilee Trophy. Il faudra attendre 2001 pour que l’Estrie remette la main sur ce précieux trophée!
Au début de l’année 1922, une annonce parue dans le Sherbrooke Daily Record préfigure la création d’un club pour les dames intéressées par le curling. (Image Sherbrooke Daily Record, 11 janvier 1922)
Au début de l’année 1922, une annonce parue dans le Sherbrooke Daily Record préfigure la création d’un club pour les dames intéressées par le curling. (Image Sherbrooke Daily Record, 11 janvier 1922)
Les clubs masculin et féminin, qui partageaient déjà les mêmes locaux depuis la fin du 19e siècle, fusionnent au cours des années 1970.
Discipline olympique et sport populaire, plus ouvert et plus démocratique, le curling est toujours bien vivant à Sherbrooke. Le Club qui fêtera ses 144 ans dans les prochaines semaines fait même partie du patrimoine immatériel de Sherbrooke. De quoi «briser la glace»!
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Conception graphique La Tribune, Cynthia Beaulne