LAURENT LAVIGNE

Le remplaçant de dernière minute devenu olympien

(Photo Le Nouvelliste, Stéphane Lessard)

(Photo Le Nouvelliste, Stéphane Lessard)

L’histoire des premiers coups de rame de Laurent Lavigne a de quoi faire sourire. À peine âgé de 7 ans, il était allé voir son frère aîné Albert prendre part à une petite régate provinciale. Malade, une participante ne s’était pas présentée et il fallait quelqu’un pour prendre sa place dans une embarcation à deux. À la suggestion de son frère, Laurent a fait office de remplaçant. C’était le premier chapitre d’une histoire d’amour entre le kayak et Lavigne qui culminera à Paris lors des prochains Jeux olympiques.

Après Vincent Jourdenais, Andréanne Langlois et Laurence Vincent-Lapointe, Laurent Lavigne est le plus récent membre du Club de canoë-kayak de vitesse de Trois-Rivières à se rendre aux Jeux olympiques. (Photo Le Nouvelliste, Stéphane Lessard)

Après Vincent Jourdenais, Andréanne Langlois et Laurence Vincent-Lapointe, Laurent Lavigne est le plus récent membre du Club de canoë-kayak de vitesse de Trois-Rivières à se rendre aux Jeux olympiques. (Photo Le Nouvelliste, Stéphane Lessard)

Lorsqu’il se remémore ses débuts dans le sport, le Trifluvien ne peut pas s’empêcher de sourire. Qui aurait pensé que le petit garçon de 7 ans allait devenir cet imposant athlète olympique 16 ans plus tard?

«C’est une drôle d’histoire, mes débuts. Mon frère aîné, Albert, avait commencé avant moi. J’étais allé voir Albert à une petite régate entre les clubs du Québec. J’étais là en tant que spectateur. Mon frère était allé voir l’entraîneur en disant que je pouvais prendre la place de l’athlète malade. Je pense que nous avions terminé à l’avant-dernière position dans la course! J’avais eu la piqûre. L’été suivant, j’étais inscrit au camp de jour», a raconté Lavigne.

C'est à la suite de sa 2e place au Championnat du monde junior de 2019 que Lavigne a réalisé qu'il avait le potentiel pour aller aux Jeux olympiques. (Photo Le Nouvelliste, Stéphane Lessard)

C'est à la suite de sa 2e place au Championnat du monde junior de 2019 que Lavigne a réalisé qu'il avait le potentiel pour aller aux Jeux olympiques. (Photo Le Nouvelliste, Stéphane Lessard)

Au Québec, le kayak de vitesse est loin d’avoir une cote de popularité aussi élevée que le hockey, le football ou le soccer. Pour Lavigne, son amour pour ce sport va bien au-delà de la compétition. C’est d’abord un endroit où il peut se sentir bien.

«C’est tellement agréable. Tu fais glisser ton bateau sur l’eau, dans la nature. Tu es en contrôle. C’est un super beau sentiment quand tu donnes un coup de rame dans l’eau. Je me suis attaché à ça, tout comme au groupe d’amis que je me suis fait ici.»
Laurent Lavigne

Ce à quoi il fait allusion avec ce «ici», c’est le Club de canoë-kayak de vitesse de Trois-Rivières. Quand il en est question, Lavigne ne cache pas sa fierté d’en être un représentant. Non, ce n’est pas le plus gros club au Québec, mais l’organisation peut tout de même se vanter d’avoir une impressionnante brochette d’olympiens, soit Vincent Jourdenais, Andréanne Langlois et la médaillée Laurence Vincent-Lapointe. D’ailleurs, alors que l’entrevue se déroulait avec Lavigne, Vincent-Lapointe était sur l’eau tout près avec une ribambelle de jeunes sportifs qui, peut-être, aspire un jour à les imiter.

«Nous avons la chance d’avoir un beau club et une magnifique rivière ici. Ce club représente beaucoup. C’est là que j’ai commencé ma passion et c’est là que je vois plusieurs personnes y découvrir le kayak. Ça me fait toujours du bien de revenir et d’aider les plus jeunes. Je peux me ressourcer quand j’y suis.»

Laurent Lavigne sera la recrue de l'équipage canadien à l'épreuve du K4 500 m. (Photo Le Nouvelliste, Stéphane Lessard)

Laurent Lavigne sera la recrue de l'équipage canadien à l'épreuve du K4 500 m. (Photo Le Nouvelliste, Stéphane Lessard)

Un long processus avec une fin heureuse

La première fois que Lavigne a compris qu’il était possible de rêver aux Jeux, c’était à la suite de sa 2e place signée à l’épreuve du K1 500 m lors du Championnat du monde junior de 2019. Il avait retenu l’attention des autres et ceux-ci avaient même réalisé avant lui qu’il avait ce qu’il fallait pour être un olympien.

«Après ce résultat, il y avait les Championnats canadiens. Je n’étais pas encore avec l’équipe nationale chez les seniors, mais, à ce moment, un athlète de l’équipe était venu me voir pour me demander quel était mon plan pour aller aux Jeux. C’était un an avant les Jeux de Tokyo. Il m’a fait réaliser que les gens croyaient en moi. Ça m’est rentré dans la tête là. Je n’ai pas participé aux Jeux de Tokyo, mais j’étais dans le coup. Après, Paris était devenu mon objectif à 100%.»

(Vidéo Le Nouvelliste, images Stéphane Lessard, montage Amélie St-Yves)

(Vidéo Le Nouvelliste, images Stéphane Lessard, montage Amélie St-Yves)

De la patience, il en a donc fallu beaucoup à Lavigne avant de finalement être confirmé pour l’aventure parisienne de cet été. C’est à quelques jours seulement de la Saint-Jean-Baptiste, soit à peine un mois avant le début de la XXXIIIᵉ olympiade que le Trifluvien a enfin su qu’il serait de la partie.

«Ça représente beaucoup de choses d’être un athlète olympique, notamment plusieurs années d’efforts et d’entraînement avec plusieurs belles personnes qui m’ont entouré tout au long de mon parcours. Quand c’est officiel, on se sent pas mal plus léger. Je me sens d’attaque. Oui, il y a du stress et de la pression, mais c’est positif. Il ne reste qu’à donner une dernière poussée jusqu’aux Jeux.»

Ce qu’il faut comprendre, c’est que le processus de sélection pour être sur l’équipage canadien qui sera de la partie à l’épreuve du K4 sur 500 m s’étale sur plusieurs mois. L’an dernier, Lavigne et ses coéquipiers Nicholas Matveev, Pierre-Luc Poulin et Simon McTavish avaient obtenu quatre des six quotas du Canada lors du Championnat du monde. Cependant, bien qu’ils avaient sécurisé ces quotas, ceux-ci n’étaient pas assurés d’une participation aux Jeux. Il fallait encore convaincre les dirigeants de Canoë-Kayak Canada qu’ils étaient dignes d’une place sur l’embarcation A du Canada et ensuite remporter son billet aux essais nationaux 2 présentés au bassin olympique à la fin juin.

«Il y a plusieurs facteurs déterminants pour identifier l’équipe. Il faut avoir une chimie et être bon en équipe. Oui, on peut être bon individuellement, mais on doit être efficace avec des coéquipiers. Il y a les performances individuelles qui sont prises en considération. Il faut bien faire sur ces courses afin que les entraîneurs voient que nous ajoutons une valeur à l’équipage. Ça faisait plusieurs années (2021) que nous ramons ensemble. Il y a un lien entre nous quatre. Ça nous permet de performer au-delà de nos capacités.»

Le plaisir qu'il ressent à l'idée de filer sur l'eau est au centre de la passion de Lavigne pour le kayak de vitesse. (Photo Le Nouvelliste, Stéphane Lessard)

Le plaisir qu'il ressent à l'idée de filer sur l'eau est au centre de la passion de Lavigne pour le kayak de vitesse. (Photo Le Nouvelliste, Stéphane Lessard)

La petite recrue

Non, Lavigne n’est pas le plus frêle des membres de l’équipage canadien, mais il sera tout de même le petit nouveau dans l’aventure olympique. Matveev, Poulin et McTavish étaient tous de la partie à Tokyo et Lavigne remplacera le médaillé olympique Mark de Jonge, parti à la retraite. «Mes coéquipiers vont certainement m’aider à gérer le tourbillon olympique. C’est tellement gros avec les médias et tout le monde qui suit nos performances. Le kayak, ça demeure un peu méconnu. Oui, le Championnat du monde et les épreuves de la Coupe du monde sont regardés, mais jamais autant que les Jeux olympiques. Nous désirons aussi vivre notre propre expérience.»

Dans l’idéal, les Canadiens aimeraient bien être de la finale A sur le K4 500 m. Une fois à cette étape, tout semble permis, mais le simple fait d’être parmi les meilleures embarcations de la discipline serait un gros exploit, assure Lavigne.

«Sur le plan sportif, je veux faire une performance dont je pourrai être fier. Nous avons tous une responsabilité dans le bateau. Je souhaite tout donner et faire une bonne course. Si ça arrive, je pense que nous pourrons signer un résultat dont nous serons fiers. La finale A, ce serait un objectif. Le kayak, c’est un peu un drôle de sport, surtout l’événement à quatre. C’est tellement serré. Faire la finale A, ce serait une grosse étape. Une fois là, ce serait un objectif atteint, mais nous voudrions ensuite une médaille ou encore un top 5.»

Conception graphique La Tribune, Cynthia Beaulne

(Photo Le Nouvelliste, Stéphane Lessard)

(Photo Le Nouvelliste, Stéphane Lessard)