Le temps où les girafes arrivaient par train

Drôle de faune au centre-ville de Sherbrooke! Ces deux éléphants conduits sur ce qui est peut-être la rue Frontenac vers 1905 (avec réserves) ont probablement effrayé quelques chevaux… (Photo Fonds Frederick James Sangster, Musée d’histoire de Sherbrooke)

Drôle de faune au centre-ville de Sherbrooke! Ces deux éléphants conduits sur ce qui est peut-être la rue Frontenac vers 1905 (avec réserves) ont probablement effrayé quelques chevaux… (Photo Fonds Frederick James Sangster, Musée d’histoire de Sherbrooke)

M. Hist,

Il y a eu des cirques, il y a longtemps à Sherbrooke? Je me demande où ils tenaient leur spectacle.

Michel

Cher Michel,

Ah, le cirque! Jongleurs, acrobates, lions rugissants et fanfares entraînantes… Oui, Sherbrooke a bel et bien vibré au rythme des grands chapiteaux! Et pas n’importe lesquels: le légendaire cirque d’Adam Forepaugh a fait halte chez nous, dans sa gloire du 19e siècle.

Le 27 août 1875, lors de sa neuvième tournée canadienne, Forepaugh débarque à Sherbrooke après avoir ébloui les foules à Saint-Hyacinthe, Granby, Waterloo et Richmond. Et quand on dit débarqué… c’est au sens propre! Le cirque arrive par train, avec hommes, animaux exotiques, matériel et chapiteaux. Le site choisi? Un vaste terrain derrière la gare du Grand-Trunk, tout près du cœur ferroviaire de la ville. Pratique pour l’arrivée des bêtes… et des foules!

Car oui, la foule est immense. Des trains spéciaux affrétés par le Quebec Central amènent des curieux, c’est l’événement de la saison! Pour 50 sous (25 pour les enfants), on entre dans un univers fabuleux: girafes, lions, rhinocéros, oiseaux rares, kangourous, et même des merveilles mécaniques comme des machines à vapeur ou un ballon à air chaud.

Durant l’été 1875, on annonce en grande pompe l’arrivée du très populaire cirque Forepaugh, en tournée au Canada. En perspective, de nombreuses espèces d’animaux (et de polices de caractère) pour un spectacle mettant en vedette humains, animaux et dernières technologies! (Photo Le Progrès de l'Est, 21 août 1875)

Durant l’été 1875, on annonce en grande pompe l’arrivée du très populaire cirque Forepaugh, en tournée au Canada. En perspective, de nombreuses espèces d’animaux (et de polices de caractère) pour un spectacle mettant en vedette humains, animaux et dernières technologies! (Photo Le Progrès de l'Est, 21 août 1875)

Et tenez-vous bien: c’est en 1880, toujours grâce au cirque Forepaugh, que l’électricité est pour la première fois présentée à Sherbrooke! Le cirque ne faisait pas rêver que les enfants, il introduisait aussi le progrès dans les petites villes.

Mais comme toute grande histoire, celle de Forepaugh a une fin. Après la mort du fondateur en 1890, le cirque perd en popularité. Dans les années 1910, il disparaît peu à peu du paysage, concurrencé par d’autres troupes itinérantes.

Au début du 19e siècle, c’est au tour du cirque Norris and Rowe, d’installer ses sept grandes tentes à Sherbrooke. Le lieu choisi cette fois? Le terrain de l’ancienne briqueterie Cuzner, tout près de l’actuel manège militaire des Fusiliers sur la rue Belvédère. L’entrée sur le site où se trouvent les chapiteaux s’effectue par la rue Goodhue (actuelle rue Camirand). Ce sera aussi à cet endroit que le cirque de Walter L. Main vient s’installer en 1903!

Mais au fil des années, le site est jugé un peu trop étroit. On envisage alors de le déplacer sur un terrain plus vaste, soit celui de la ferme Short, située sur ce qu’on appelle aujourd’hui la rue Galt.

Durant un temps, c’est sur le terrain de l’ancienne briqueterie «Old Brick Yard Grounds» entre les rues Goodhue (Camirand) et Belvédère que se tiennent les spectacles de cirque. Mais le terrain est rapidement considéré comme trop peu spacieux… (Photo The Sherbrooke Examiner, 12 juin 1903)

Durant un temps, c’est sur le terrain de l’ancienne briqueterie «Old Brick Yard Grounds» entre les rues Goodhue (Camirand) et Belvédère que se tiennent les spectacles de cirque. Mais le terrain est rapidement considéré comme trop peu spacieux… (Photo The Sherbrooke Examiner, 12 juin 1903)

Le cirque Forepaugh plantait ses chapiteaux sur le terrain de la British American Land Company aux abords de la gare de la rue du Dépôt. Plutôt pratique pour acheminer les animaux, le matériel… Et les spectateurs! (Photo Atlas of the City of Sherbrooke, 1881, planche B)

Le cirque Forepaugh plantait ses chapiteaux sur le terrain de la British American Land Company aux abords de la gare de la rue du Dépôt. Plutôt pratique pour acheminer les animaux, le matériel… Et les spectateurs! (Photo Atlas of the City of Sherbrooke, 1881, planche B)

Les temps changent, les décors aussi. Mais ces souvenirs de ménageries, de clowns et d’inventions lumineuses continuent de briller dans la mémoire collective. Qui sait? Peut-être que votre arrière-arrière-grand-mère a déjà croisé une girafe en allant prendre le train…

Même après l’âge d’or du cirque, Sherbrooke ne manque pas d’animations: jongleurs, clowns, acrobates ou équilibristes viennent rivaliser de talent pour émerveiller le public. (Photo Fonds Albert Ball, Musée d’histoire de Sherbrooke)

Même après l’âge d’or du cirque, Sherbrooke ne manque pas d’animations: jongleurs, clowns, acrobates ou équilibristes viennent rivaliser de talent pour émerveiller le public. (Photo Fonds Albert Ball, Musée d’histoire de Sherbrooke)

Bien sûr, plusieurs autres cirques sont passés à Sherbrooke ensuite, il s’agit ici d’un portrait des plus vieilles troupes à séjourner en ville.

Vous le voyez, à Sherbrooke comme ailleurs, les animaux sont depuis longtemps dans nos vies: dans la nature, à la maison, sous un chapiteau ou dans les champs, le spectacle ne semble jamais s’arrêter!

Nul besoin de regretter le défunt cirque Forepaugh: si vous souhaitez voir encore plus d’animaux (qui ne le voudrait pas?), rendez-vous au Musée d’histoire de Sherbrooke à la rencontre d’une Drôle de faune, un florilège pas bête du tout qui vous fera voyager dans le temps à dos d’animaux!

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    Cynthia Beaulne, La Tribune

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