Que la vraie cathédrale de Sherbrooke se lève!

Pendant près de 40 ans, la cathédrale Saint-Michel, sur la rue Marquette, n’a que son sous-sol et un petit clocher. (Photo vers 1950, Fonds Frederick James Sangster, Mhist)

Pendant près de 40 ans, la cathédrale Saint-Michel, sur la rue Marquette, n’a que son sous-sol et un petit clocher. (Photo vers 1950, Fonds Frederick James Sangster, Mhist)

Bonjour M. Hist,

Ça fait plusieurs fois que j’entends parler de la «cathédrale de l’Est»… Je suis à Sherbrooke depuis quand même assez longtemps pour connaître le patrimoine religieux, mais je ne crois pas qu’on ait eu une cathédrale dans l’est de la ville? Qu’en pensez-vous?

Cher lecteur,

Je pense qu’il est temps pour nous d’aller faire quelques pas dans l’est de la ville! Aucune chance pour nous de manquer la «cathédrale de l’Est» dont vous parlez: sa toiture étincelante la fait briller de mille feux.

Et pourtant, arrivé sur place, c’est bien en vain que vous trouverez une cathédrale dans l’est de la ville de Sherbrooke… Tout simplement, car il n’y en a pas! Pourtant, vous avez remarqué justement que l’on croise ou on entend parfois cette appellation de la «cathédrale de l’Est» pour désigner l’église Saint-Jean-Baptiste. Alors, qu’en est-il?

L’imposante façade de l’église Saint-Jean-Baptiste en 1950. (Photo Fonds Louis-Philippe Demers, Mhist)

L’imposante façade de l’église Saint-Jean-Baptiste en 1950. (Photo Fonds Louis-Philippe Demers, Mhist)

Il faut se souvenir de ce qu’est, d’abord, une cathédrale: c’est l’édifice religieux dont la fonction est d’accueillir le siège de l’évêque. Il n’y en a donc en principe qu’une seule à Sherbrooke, le quartier Est ne relevant pas d’un diocèse différent du reste de la ville.

Si l’on remonte avant 1900, il n’y a que trois églises catholiques à Sherbrooke: l’église Saint-Michel (sur la rue Marquette), l’église Saint-Patrick (à l’angle des rues King Ouest et Gordon) et l’église Saint-Jean-Baptiste.

La première chapelle, ainsi que la paroisse catholique Saint-Jean-Baptiste, voient le jour en 1884. Au début du siècle suivant, devant l’expansion grandissante du quartier et l’augmentation du nombre de fidèles, il est envisagé de bâtir une église répondant davantage aux besoins et plus imposante. Après plusieurs années de travaux, et à l’aide des plans des architectes Wilfrid J. Grégoire et Raoul-Adolphe Brassard, la nouvelle église Saint-Jean-Baptiste est inaugurée en 1908.

Quant à la cathédrale, celle qui porte officiellement ce nom et en remplit les fonctions, elle se situe au cœur du plateau Marquette, au centre de la ville. Si en 1855, il ne s’agit encore que de «l’église» Saint-Michel, elle obtient son statut de cathédrale en 1874, lorsque Sherbrooke devient un diocèse.

L’intérieur de l’église Saint-Jean-Baptiste au début du XXe siècle. (Photo Collection Clovis Roy, Mhist)

L’intérieur de l’église Saint-Jean-Baptiste au début du XXe siècle. (Photo Collection Clovis Roy, Mhist)

Les travaux de la future cathédrale Saint-Michel s’étalent sur une quarantaine d’années, de la démolition de la première église en 1915 à la reprise des travaux en 1956 par l’architecte Louis-Napoléon Audet. Le 28 septembre 1957, la cathédrale Saint-Michel de Sherbrooke, enfin achevée, est inaugurée.

La «cathédrale de l’Est» est sans conteste l’un des marqueurs essentiels du paysage de l’Est de la ville vers 1964. (Photo Collection Jacques Darche, Mhist)

La «cathédrale de l’Est» est sans conteste l’un des marqueurs essentiels du paysage de l’Est de la ville vers 1964. (Photo Collection Jacques Darche, Mhist)

L’église Saint-Jean-Baptiste n’est donc pas surnommée «cathédrale» parce qu'elle accueille l’évêque. Le surnom vient davantage d’une chicane de clocher gonflée d’orgueil: les gens de l’Est, généralement de ménages plus modestes, avaient un lieu de culte avec un caractère architectural riche, une prestance digne d’un monument et doté d’un magnifique orgue Casavant. Le «chef-lieu» du diocèse, pour sa part, a dû se contenter de la chapelle Pauline durant plus de trois décennies comme lieu de célébrations, tant les travaux de la cathédrale Saint-Michel tardaient à finir. Et disons-le, le clocher de l’église Saint-Jean-Baptiste est à l’époque – et est encore aujourd’hui – un repère emblématique pour le quartier, narguant presque celles et ceux qui le regardent de l’Ouest…

Cela dit, malgré ces mises à niveau, laissons tout de même à la «cathédrale de l’Est» son surnom… et ses guillemets.

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  • Conception graphique La Tribune, Cynthia Beaulne