Le quotidien est rempli de tracasseries. De nombreux travailleurs de l’ombre n’attendent qu’un appel pour voler à la rescousse, des as de leur domaine qui viennent souvent sauver la mise. Incursion dans la routine de ces superhéros de la petite vie.

Cesser net de tuer les fourmis qui envahissent votre maison semble tout à fait contre-intuitif.

Pourtant, Gabriel Bolduc répète cette consigne chaque fois qu’il quitte une demeure où il vient de déposer de la nourriture contaminante sur les «routes biologiques» des petites bestioles noires.

Les fourmis ont deux estomacs. Un pour soi et l’autre sociale, pour le nid. L’insecte consomme une part de la nourriture-piège et en rapporte aussi à ses amies. Minuscule cheval de Troie à six pattes.

Lui ne dit pas le mot poison.

«L’idée, ce n’est pas de tuer tous les insectes. L’écosystème est important. Si eux autres ne sont pas là, nous, on n’est pas là», résume celui qui est dans le domaine depuis 14 ans.

Il a fondé l’entreprise Exterminateurs Québec.ca avec un ami, mais n’en est plus propriétaire. Il travaille aujourd’hui dans la gestion parasitaire six mois par année. Voyages et érablière l’occupent l’autre moitié de l’année.

Premier sur les lieux après l’appel, Gabriel fait surtout des maisons et des appartements. Quoique lors de sa tournée avec Le Soleil, un restaurateur a appelé sa compagnie pour des fourmis charpentières dans la salle à manger.

Il vend services et traitements. Les techniciens viendront accomplir le travail par la suite.

Fourmis, souris, punaises de lit, coquerelles, rats, perce-oreilles, chauve-souris, guêpes, araignées, cloportes: à chaque bibitte son procédé pour les éliminer.

Dans le quartier Saint-Sauveur pour constater la présence de rats dans l’arrière-cour et dans le vide sanitaire d’un immeuble, le locataire lui fait la remarque qu’il «ressemble à... à...»

«Boom Desjardins! Je me le fais toujours dire», répond du tac au tac l’exterminateur, avant même que l’homme ait pu entamer le refrain de Calvaire.

Manifestement, il est loin d’être le premier à lui souligner.

«Il y a du monde ici!» enchaîne l’expert en plein travail, qui n’a pas besoin de voir de ses yeux les rongeurs pour constater les signes de leur occupation.

Gabriel Bolduc assure que son objectif n’est jamais d’anéantir toutes les créatures vivant à la ronde, mais bien de les empêcher de nuire aux activités humaines dans la mesure du possible.

Les biopesticides devraient prendre davantage de place dans le marché de la gestion parasitaire, selon lui. Et le Québec pourrait devenir un meneur nord-américain en la matière.

«La majeure partie de nos pesticides sont fabriqués aux États-Unis, où la réglementation est vraiment moindre. Là-bas, si tu as envie d’attaquer tes fourmis avec une mitraillette, tu peux! Façon de parler. Mais ici, c’est beaucoup plus contrôlé», fait-il valoir.

«Les études sur les biopesticides ne sont pas vraiment avancées, parce que tout vient de là-bas. On pourrait lutter encore mieux avec des biopesticides. On en a, sauf qu’on n’a pas l’homologation pour tous les insectes.»

Une culture de champignons est dorénavant utilisée pour éliminer les punaises de lit. Produit à la fois naturel et très efficace qui «inflige une maladie hyper contagieuse à l’insecte», qui meurt aussitôt.

Pour le meilleur et pour le pire, la principale arme de l’exterminateur s’avère souvent le client lui-même. Qui doit suivre ses consignes à la lettre afin de se débarrasser avec succès d’une colonie de parasites.

L’aide psychologique qu’apporte un exterminateur n’est pas à négliger. La présence en masse de petits animaux nuisibles provoque souvent de la détresse, voire de la panique chez les gens.

Il se rappelle d’infestations de punaises de lit simultanées dans deux édifices à logements situés à bonne distance et même séparés par le fleuve. L’un à Québec et l’autre à Lévis.

Malgré des interventions complètes, la persistance du problème aux deux endroits a plongé les exterminateurs dans le doute sur leurs propres techniques.

«Jusqu’à ce qu’on se rende compte que les deux blocs se contaminaient aller-retour parce qu’un locataire du premier immeuble fréquentait une locataire du deuxième!» s’esclaffe-t-il, assurant que les deux brasiers ont vite été éteints lorsqu’enfin bien isolés.

Dans la série «Sur appel»

SERRURIER

AGENT ANIMALIER

TECHNICIEN APRÈS SINISTRE

MÉCANICIEN D'ASCENSEUR

DESIGNER GRAPHIQUE
Nathalie Fortier, Le Soleil

DESIGNER GRAPHIQUE
Nathalie Fortier, Le Soleil