Entre féérie et migraine lumineuse, l’art du juste éclat
Par Marie-Noëlle Lajoie
Chaque année, à l’approche de décembre, nos quartiers s’illuminent à coups de guirlandes et de projecteurs. Certains rivalisent d’audace, ou d’excès, au point d’attirer les curieux et de bloquer la circulation.
Entre féérie et migraine lumineuse, l’art du juste éclat
Par Marie-Noëlle Lajoie
Chaque année, à l’approche de décembre, nos quartiers s’illuminent à coups de guirlandes et de projecteurs. Certains rivalisent d’audace, ou d’excès, au point d’attirer les curieux et de bloquer la circulation.
« On les adore, nous, ceux-là », sourit Annie Beauvais, directrice des ventes et du marketing chez Leblanc Illuminations Canada. « Ce sont de vrais passionnés. Certains particuliers au Québec investissent depuis des années et finissent avec de véritables parcs lumineux devant chez eux ! »
Mais derrière les façades étincelantes et les rues qui brillent de mille feux, une question demeure : comment créer la féérie sans tomber dans le clinquant ? La réponse, selon Annie Beauvais, tient en trois mots : mesure, émotion et cohérence.
Pour elle, la lumière de Noël ne se limite pas à un décor : elle crée du lien. « Les illuminations festives, ça apporte beaucoup plus que la tradition. C’est devenu une façon d’embellir nos espaces et de faire sortir les gens malgré la noirceur de l’hiver. »
Et c’est justement là que réside la première règle du bon dosage : penser à l’expérience humaine avant tout. Une belle mise en lumière ne cherche pas à éblouir, mais à faire sourire. Elle s’inscrit dans un environnement, une rue, une place publique, un quartier, et invite les gens à s’y arrêter, à respirer, à ressentir.
Les municipalités l’ont compris : de plus en plus d’installations s’étendent au-delà du temps des fêtes. « On dit souvent qu’on est des marchands de bonheur », ajoute Beauvais. « Pendant la pandémie, c’est tout ce qui restait : la lumière. Et elle a fait du bien à tout le monde. »
La deuxième clé, c’est de respecter l’esprit.
Depuis les chandelles accrochées aux sapins germaniques du XVIIᵉ siècle jusqu’à la première guirlande électrique en 1882, la lumière de Noël symbolise toujours la même chose : repousser la nuit. Elle parle d’espoir, pas de performance.
Chez Leblanc Illuminations Canada, cette philosophie guide chaque création. « On mise sur la beauté, pas sur la puissance », précise Beauvais. « Nos clients veulent des décors beaux le soir, mais aussi de jour. On travaille avec des matériaux recyclables, de l’impression 3D et des pièces durables. »
Il faut donc penser la lumière comme un geste durable, pas comme un exploit visuel.
La féérie en équilibre
Créer une ambiance lumineuse réussie, c’est avant tout une question de composition. Trop, et l’œil sature. Pas assez, et la magie s’éteint. « On veut que la lumière attire le regard sans l’agresser. Elle doit guider, pas dominer », affirme Annie Beauvais.
Les règles du design s’appliquent donc ici aussi.
La répétition, d’abord : reprendre une couleur, un rythme, une forme d’une façade à l’autre, d’une branche à l’autre, crée l’unité et l’harmonie.
Le contraste, ensuite : marier l’ombre et la lumière, le chaud et le froid, le mat et le brillant. C’est dans la différence que naît la profondeur.
L’espace, enfin : savoir quand s’arrêter. Laisser des zones de calme où l’œil peut se reposer, comme une respiration visuelle entre deux éclats. Oui, le vide fait partie du design! L’espace noir autour d’un décor lumineux, c’est ce qui lui donne sa force. Ainsi, une guirlande bien placée peut devenir plus éloquente que cent ampoules alignées. La lumière prend tout son sens lorsqu’elle dialogue avec l’obscurité.
Les tendances 2025 vont d’ailleurs dans ce sens : des tons sobres et intemporels, le blanc chaud marié au blanc froid, clin d’œil aux reflets dorés et argentés qui suggèrent l’opulence sans les fautes de goût. Les installations sont programmées comme une mise en scène pensée pour durer. Out les effets stroboscopiques et les projecteurs de formes!
Quand la lumière devient expérience
Le Québec n’a pas besoin de grand-chose pour être magique. La neige, le givre et la lumière bleutée des fins d’après-midi suffisent souvent. La lumière ne sert donc pas à montrer, mais à toucher. Elle devient un souvenir collectif, un instant de joie partagé.
Dans un monde saturé d’écrans, la lumière garde ce pouvoir rare : celui d’apaiser. Une flamme, un halo, une guirlande qui s’éteint lentement. Parfois, c’est tout ce qu’il faut pour évoquer la joie et l’importance de ralentir à cette période de l’année. « Je n’ai jamais vu quelqu’un regarder une illumination sans sourire », confie Annie Beauvais. Le bonheur, c’est ça que ça provoque avant tout. »
Créer la féérie sans tomber dans le clinquant, c’est donc ça : penser juste, créer beau, faire du bien.
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