UN CIMETIÈRE OÙ REPOSENT LES PIONNIERS DE SHERBROOKE

Un cimetière où reposent les pionniers de Sherbrooke
Par M. Hist - Musée d'histoire de Sherbrooke

Cher M. Hist,
J’ai beaucoup entendu parler du cimetière de la rue Prospect dernièrement, le cimetière St. Peter’s. Il aurait une histoire particulière... Voudriez-vous nous la raconter?
Lyse
Chère Lyse,
Ah, le St. Peter’s Cemetery! À première vue, c’est un coin paisible de verdure où le temps semble suspendu. Mais derrière ses pierres usées et ses clôtures centenaires se cache une histoire qui remonte aux premiers jours de Sherbrooke.

Tout commence au début des années 1820. On est à peine vingt ans après l’arrivée des pionniers au confluent, mais déjà, la petite communauté rêve d’une église. En 1821, c’est William B. Felton, figure locale bien connue, qui préside le comité chargé de la construction. De ce fait, la mission anglicane Sherbrooke-Lennoxville, rattachée à l’Église anglicane, est sans doute l’une des plus anciennes organisations établies dans le jeune village.
On retient donc 1822 comme l’année de fondation de la paroisse, bien que c’est seulement le 30 janvier 1823 que la congrégation est officiellement reconnue. La mission de Lennoxville-Ascot dessert alors à la fois les villes de Sherbrooke et de Lennoxville.
En juin 1823, le premier prêtre, le révérend Clement Fall LeFebvre, est ordonné. Et c’est lui qui officie les premiers sacrements: en avril, il baptise sa propre fille, Ellen Bennett, et en mai, il célèbre le premier enterrement, celui de la petite Miriam Eleanor Willard. Voilà un départ qui plante le décor: vie et mort inscrites dès le début dans l’histoire de la paroisse.
C’est ici que reposent plusieurs pionniers du jeune village de Sherbrooke: Bowen, Beckett, Terrill… Le cimetière anglican de l’ancienne paroisse St. Peter’s était situé aux marges de la ville lors de son ouverture, il y a près de deux siècles. (Photo Atlas of the City of Sherbrooke, 1881, planche K)
C’est ici que reposent plusieurs pionniers du jeune village de Sherbrooke: Bowen, Beckett, Terrill… Le cimetière anglican de l’ancienne paroisse St. Peter’s était situé aux marges de la ville lors de son ouverture, il y a près de deux siècles. (Photo Atlas of the City of Sherbrooke, 1881, planche K)
Qui dit arrivée d’une église, dit également aménagement d’un cimetière. En 1824, on érige la première église, en bois, à l’endroit où se trouve aujourd’hui le Musée des beaux-arts de Sherbrooke, anciennement l’édifice de l’Eastern Township’s Bank. L’église est reconstruite en 1827 et porte jusqu’en 1844 le nom de St. Paul. Entre-temps, le cimetière qui nous intéresse prend forme sur la rue Melbourse (actuelle rue Prospect). Situé en marge du hameau, on le connaît rapidement sous plusieurs désignations: «anglican cemetery», «english cemetery», «old english cemetery» ou encore «episcopalian cemetery».

Au tournant du 20e siècle, la paroisse se dote d’une nouvelle église en brique, de style néogothique, à l’angle des rues Montréal et Dufferin. Avec son presbytère tout neuf, elle marque une nouvelle étape pour la communauté. Quant au cimetière, il se modernise lui aussi: en 1904, on élargit les chemins avec des pierres venues de la mine d’Eustis, et on installe une clôture de fer. Pourtant, à partir des années 1910, il passe un peu au second plan dans la presse locale, éclipsé par le «flambant neuf» cimetière Elmwood, plus vaste et plus fréquenté.
Une vingtaine d’années après l’établissement du premier lieu de culte anglican, l’église jadis située sur le terrain de l’Eastern Township’s Bank est déplacée à l’angle des rues Commercial (actuelle Dufferin) et Montréal, vers 1890. (Photo Fonds Frederick James Sangster, Musée d’histoire de Sherbrooke)
Une vingtaine d’années après l’établissement du premier lieu de culte anglican, l’église jadis située sur le terrain de l’Eastern Township’s Bank est déplacée à l’angle des rues Commercial (actuelle Dufferin) et Montréal, vers 1890. (Photo Fonds Frederick James Sangster, Musée d’histoire de Sherbrooke)
Mais le cimetière St. Peter’s reste un lieu de mémoire important. Il abrite les tombes de figures marquantes de Sherbrooke. Le premier maire, George F. Bowen, y repose, tout comme le major Henry Beckett, dont la ferme a donné son nom au bois Beckett. La famille de Joseph H. Terril, pionnier dans l’Est de la ville, y est également enterrée. Marcher entre les pierres, c’est un peu feuilleter les premières pages de l’histoire de la ville.
La paroisse St. Peter’s est dissoute en 2007, mais le cimetière, lui, n’a jamais cessé d’accueillir des inhumations. Aujourd’hui encore, des familles choisissent ce lieu chargé d’histoire pour y reposer en paix.
Alors, oui, le cimetière de la rue Prospect a une histoire bien particulière. Il raconte à sa façon les débuts de Sherbrooke, entre les prières d’une communauté naissante, les rires des enfants baptisés, les unions de familles locales et… le silence respectueux des funérailles. Et si vous y passez un jour, ne soyez pas étonné d’avoir l’impression que les vieilles pierres murmurent encore quelques anecdotes du passé.
Lyse, joignez-vous à moi pour remercier en passant nos amis du Centre de Ressources pour l’Étude des Cantons-de-l’Est (CRCE-ETRC), qui nous ont prêté main-forte dans l’élaboration de cette réponse!
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